" Un rhume bien soigné dure une semaine, disait notre docteur.
Et, non soigné, comptez sept jours ! "
Premier jour
Catarrhe, du grec " kata ": en bas, et " rhéô ": je coule.
Allo ! Jé coule ! D'où vient tout ce liquide ?
Des boyaux de la tête ?
" Rhume de cerveau ! Ça prouve que t'en as un ! ", disait maman.
" Mal de tête, mal des grands esprits. Seuls les imbéciles s'en plaignent ! ", disait papa.
Intifada dans la tête. Barbelés dans la gorge. La guerre est déclarée !
De l'eau dans les veines. Du thym au miel dans la jatte. Et Arcelor, phase à chaud, dans la poitrine.
Les bruits cotonneux des mondes extérieurs, désamplifiés, délicieusement amortis,
parviennent à faire vibrer mollement les tympans molletonnés.
L'absence de désirs. Hormis celui de la paix à me foutre éternellement.
Le désir d'absence. L'envie de ne pas avoir d'envies.
La peur d'en avoir. Et la fin du monde au bout de l'apitoiement.
Deuxième jour
Ouvrir le journal pour apprendre qu'on pourrait dépenser 1 million d'euros à Bruxelles
pour peindre les poteaux des feux de signalisation en bleu et jaune …
Se dire qu'on n'est pas le seul à souffrir des boyaux de la tête.
Remonter et se coucher avec la conscience molle d'un arbre qu'on abat.
Troisième jour
Pénétrer dans le trou béant d'un nouveau jour d'absence.
Déchiffrer le mode d'emploi de ce putain de nouveau thermomètre
digitalo-électronique. Constater qu'on n'est pas mort.
Jeter un coup d'oeil au journal.
Renifler juste à temps pour éviter aux sondages de se prendre une goutte nasale
en plein graphique.
Un qui doit bouffer son képi -basses calories- c'est onze reuzeke Bart Druon Antigon De Wever.
On dirait que le petit Brabo reprend la main.
Non seulement la N-VA revient en-dessous de son niveau des élections 2010,
mais reuzeke doit en plus avaler ses bottes de cuir et son stick en voyant la montée de Di Ruppo
dans le cœur des Flamands.
Pensez donc : un premier ministre qui parvient à séduire 60 % des Flamands tout en étant francophone, wallon, fils d'immigrés, socialiste et … homosexuel !
Plotch ! La goutte a quand même fait mouche. Pardon, Bart. C'est le rhume…
Ouvrir une nouvelle boîte de mouchoirs.
Munitions indispensables pour escalader péniblement la face nord de l'escalier.
En respectant le palier d'acclimatation à l'altitude.
Se laisser engloutir dans l'igloo tiède de la "kwette".
Quatrième jour.
Sortir enfin du lit.
Oser un grand chantier.
Lire le journal. Et, dans la foulée, trier les journaux de la semaine.
Apprécier l'humour de certains journalistes du Soir.
Charline Van Snick positive à la cocaïne ? Titre : "La judokate aurait-elle franchi la ligne blanche ?"
Une nouvelle prison à Marche-en-Famenne : "Fermeture des portes le 4 novembre".
Merci les gars, ça remonte les bretelles du moral en train de vriller.
Assez pour aujourd'hui.
Vaquer et justifier son statut de glandeur nature.
Cinquième jour
Virer pyjama et robe de chambre - la bien nommée.
Revisiter la douche.
Regarder le journal d'un peu plus haut.
Découvrir que le monde bouge tout le temps sans vraiment changer.
Ainsi va l'immonde.
Il s'affaire. Les affaires éclaboussent des hommes du même nom.
Les patrons toisent les députés. La vérité se cache. Les menteurs nient.
Les politiques mènent campagne en disant qu'elle n'a pas commencé.
Les pauvres riches râlent. Les vrais pauvres se taisent.
Il n'y aura jamais de "Maertens dix".
Les républicains ont morflé et le cimetière américain d'Henri-Chapelle a rouvert ses grilles.
Personne n'a profité de l'absence de gardien pour se tirer.
La reine Mathilde change de robe comme de ville.
Le roi a parlé !
Laurent partage ses croquettes d'anniversaire avec ses clebs.
La Belgique tricolore va se recoucher en attendant le Brésil.
Putain, encore deux jours à devoir rester au chaud. Et si le docteur s'était trompé ?